“Je l’ai attrapé par la taille, et l’ai serré contre moi. Lentement, j’ai fait disparaître le décor. Nous n’étions plus nulle part, seul un vide obscur nous entourait. Je sentis sa respiration s’accélérer. Il était privé de tous ses sens, excepté le toucher. Tout ce qui lui restait était mon étreinte. Je le serrai plus fort. Je ne voulais pas qu’il ressente quoi que ce soit de négatif dans ses derniers moments.
Habituellement, lorsque je rencontrais des êtres dans son état, je leur offrais des pouvoirs, de la connaissance, du plaisir, et d’autres choses encore qui pouvaient sauver leur esprit. Mais lui n’aurait fait aucun usage de ces choses là. Je le sentais. Seule la destruction lui serait salvatrice. Non pas la mort ; elle était bien trop mystérieuse et effrayante. Ca n’aurait pas suffit à lui apporter le repos. Il fallait qu’il cesse d’exister, tout simplement. Plus d’angoisse, de questionnement sur l’avenir, d’appréhension de la vérité. Il n’aurait pas à s’adapter à la réalité. Il n’aurait plus rien à faire.
Quand je lui ai expliqué ce que je pouvais faire pour l’aider, il a baissé la tête. Au bout de quelques minutes, il a fini par lever les yeux sur moi, et a souri. Ce sourire… était le plus beau et le plus sincère que je n’avais jamais vu, malgré mes milliards d’années d’existence. C’est exactement à ça que ressemble le bonheur. Et maintenant que nous y sommes, il accepte et attend toujours sa disparition. Ne plus exister nulle part en cet univers, ni en aucun autre… La salvation ultime.
Son cœur battait la chamade, mais je comprenais que son anxiété n’était due qu’à la perte soudaine de ses sens. D’ailleurs, je l’avais tout de même emmené au-delà de l’espace et du temps. Je souris doucement. C’était une évidence, j’aurais dû prévoir qu’il serait effrayé. Je ne lui avais pas expliqué cette partie, après tout. Je desserrai lentement mes bras. Il s’y accrocha. Alors, je lui murmurai les derniers mots qu’il entendrait jamais. « Ne t’inquiètes pas. Je ne te quitterai pas. » A travers l’obscurité, je saisi son menton, et déposai un baiser sur ses lèvres. Il se détendit. Je sentis son esprit s’apaiser ; il était prêt.
Soudainement, il disparu. J’avais fait en sorte à ce qu’il le sente tout de même venir, car je savais qu’il voulait profiter au mieux possible de sa libération. Je soupirai. Pour la première fois depuis des siècles, un être humain avait littéralement cessé d’exister sur tous les plans. Plus rien ne restait, pas même un souvenir de lui. A part bien sûr dans mon propre esprit, mais plus pour longtemps. Il était hors de question de le trahir. Je soupirai. Il était l’être le plus vrai que j’avais rencontré, mais aussi le plus désespéré. Les humains étaient donc si mal conçus… Penser que j’aurais parfaitement pu aider à harmoniser tous ces paramètres me fendit à nouveau le cœur. Enfin, à quoi bon ruminer ces idées ? En parlant d’idées… En une fraction de seconde, j’effaçai à jamais tout ce qui le concernait de près ou de loin. Adieu, mon aimé.”
Dio’ – texte datant de début 2014.